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Christian Thomsen

À propos du titre de docteur…

Mon site « www.vocabulaire-médical.fr » comporte une boite de dialogue qui permet aux lecteurs qui le souhaitent de me poser des questions ou de m’interpeller. Il sert aussi, hélas, à recevoir de nombreux mails publicitaires, curieusement le plus souvent en russe, pour une raison qui me reste très mystérieuse.

Ces jours-ci j’ai reçu un mail d’un individu de sexe masculin, puisqu’il se prénomme Christophe, émis via une adresse universitaire (@univ-lyon1.fr). Il réagissait à mon article consacré à la différence entre « docteur » et « médecin » : https://www.vocabulaire-medical.fr/encyclopedie/035-docteur-medecin


Voici le mail de cet internaute : Extrait de Wikipédia, mais on peut trouver cette information un peu partout. Cela vous permettra de modifier l'article sur les titre de Docteurs et de Professeurs qui contient beaucoup d'erreurs.

Dans la législation française docteur est un titre universitaire et à ce titre il est d'abord réservé à ceux qui sont titulaires d'un diplôme national de Doctorat.

Certaines professions de santé, dont l’exercice est soumis à l’obtention d’une thèse d’exercice (différente d’une thèse de doctorat de 3ème cycle universitaire), peuvent également faire usage du titre de docteur.


Cette missive peu amène, assez typique du mépris que nombre d’universitaires affichent vis-à-vis du corps médical, m’a poussé à réagir et à écrire une réponse à mon interlocuteur, dont voici les principaux passages :

Cher Monsieur,

Je souhaite répondre assez longuement à votre mail dont le ton méprisant (mon article contiendrait selon vous « beaucoup d’erreurs ») m’a fortement déplu.

Je commencerai donc en soulignant une erreur grossière dans votre texte : Dans la législation française docteur est un titre universitaire et à ce titre il est d'abord réservé à ceux qui sont titulaires d'un diplôme national de Doctorat.

Quoi que vous en pensiez, le titre de docteur en médecine est aussi un titre universitaire, tout aussi légalement valable que celui dont vous vous prévalez.

Puisque vous citez Wikipédia, permettez-moi de le faire à mon tour : En France, il est d'usage que seuls les docteurs dans les disciplines de santé (médecins, pharmaciens, vétérinaires, dentistes) portent le titre de docteur comme civilité (abréviation Dr).

Et, en pratique, seuls les médecins utilisent cette civilité dans notre pays, contrairement à l’Allemagne ou l’Italie.

Non, le titre de docteur n’est pas « d’abord réservé » aux titulaires d’un diplôme national de doctorat, et Alma Mater n’aurait pas, dans sa grande mansuétude, décidé d’accorder aussi aux malheureux professionnels de santé le privilège de porter ce prestigieux titre universitaire après l’obtention d’une thèse d’exercice qui vient couronner sept années d’études universitaires.

Il existe bel et bien deux façons d’accéder au titre de docteur. La première, la plus ardue, en ayant soutenu avec succès une thèse de doctorat d’État, ce qui permet à l’impétrant d’obtenir le plus élevé des quatre grades universitaires (Wikipédia dixit). C’est apparemment votre cas. La seconde en ayant soutenu avec succès une thèse d’exercice. C’est mon cas.

La principale différence entre ces deux thèses universitaires, c’est que la thèse d’État est un aboutissement facultatif, alors que la thèse d’exercice est un préalable indispensable à l’exercice d’une profession sanitaire (médecin, pharmacien, biologiste, chirurgien-dentiste), tout comme le baccalauréat est un préalable indispensable à l’accès aux études universitaires.

Après la fin de leur parcours universitaire, une fois leur thèse d’exercice en poche, certains médecins peuvent décider de poursuivre un parcours hospitalier et universitaire, en devenant, pour une durée limitée à quatre années, Chef de clinique des Universités-Assistant des Hôpitaux. (CCU-AH). Une fois son clinicat terminé, le médecin peut tenter de devenir Professeur des Universités-Praticien hospitalier (PU-PH). Pour un médecin, une éventuelle et prestigieuse carrière universitaire ne va jamais sans une activité hospitalière.


Je voudrais vous préciser que mon site est destiné au grand public, peu familiarisé avec la terminologie médicale. Il vise avant tout la pédagogie à l’usage des très nombreux profanes en la matière, tous ceux qui ne connaissent pas la différence entre « docteur » et « médecin », ni entre « docteur » et « professeur ». Et je m’étonne que vous soyez allé y perdre votre temps précieux, car je ne vois vraiment pas ce que mon site grand public pourrait bien apporter au distingué universitaire que vous êtes.

Curieusement vous êtes le second universitaire à m’avoir fait ce genre de remarque. Mais le premier avait choisi la courtoisie pour me faire des objections pertinentes, à la suite desquelles, comme je l’indique à la fin de mon article, j’avais apporté à celui-ci les corrections qu’il m’avait suggérées. En revanche, après vous avoir lu, je ne changerai pas un iota à mon texte, aussi imparfait qu’il vous semble être.

Pour terminer, je voudrais signaler qu’il y a parfois des erreurs dans les articles publiés par Wikipédia. Dans celui intitulé « Diplôme national de doctorat (France) », dont j’ai extrait la phrase sus-citée, je relève ceci : La préparation du doctorat constitue un parcours de troisième cycle de l'enseignement supérieur (d'autres exemples de 3e cycle sont les internats de médecine ou pharmacie). L’internat (de médecine ou de pharmacie) n’est pas un cursus universitaire, mais hospitalier. Ce qui implique que le futur médecin doit à la fois valider ses études de médecine et son parcours hospitalier. Ce qui a changé par rapport à mon époque, c’est qu’actuellement tous les étudiants en médecine deviennent internes, alors qu’aux temps reculés où j’étais interne des Hôpitaux de Paris (IHP), seule une minorité d’étudiants en médecine réussissait le très sélectif Concours de l’Internat.


Le ton méprisant du mail reçu m’a d’abord fait penser que son auteur était nécessairement un universitaire, probablement doté lui-même du prestigieux titre de docteur qu’il répugnerait à partager avec les professionnels de la santé. Mais, après réflexion, je me suis dit qu’il était étrange qu’un universitaire visite un site grand public comme le mien. Aussi ai-je pensé que ce mail émanait peut-être tout simplement d’un membre administratif de base de l’université de Lyon, disposant, à ce titre, d’une adresse mail de son université. Un secrétaire, peut-être ?

J’attends sa réponse, en ne l’espérant pas trop cependant.


Cette anecdote m’est l’occasion de faire connaître à mon lectorat l’article de mon encyclopédie en ligne consacré à la différence entre les termes « docteur » et « médecin ».

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