Aide à mourir, euthanasie, suicide assisté, sédation 2
- Christian Thomsen
- 29 juin
- 3 min de lecture
Quelle est la différence entre suicide assisté et euthanasie ?
Dans la première modalité, il s’agit d’un suicide, mais que le patient n’est pas en mesure de mener à bien lui-même ; il a donc besoin de l’assistance d’une tierce personne. Notons en passant que certaines personnes qui souhaitent bénéficier du suicide assisté n’envisagent pas, alors qu’elles seraient en capacité de le faire, un suicide « classique », à l’ancienne. Souvent ces personnes disent qu’elles ne veulent pas infliger à leurs proches le fait de les découvrir mortes. Et, de fait, découvrir un proche pendu est une expérience que l’on ne souhaite à personne.
En Suisse la tierce personne qui assiste le candidat au suicide est un bénévole d’une des associations habilitées à pratiquer le suicide assisté (Exit ou Dignitas). Et le rôle des médecins, membres de ces associations, se borne à prescrire la molécule létale, que le candidat doit être en état de s’administrer lui-même pour que l’acte reste un suicide.
Dans l’euthanasie, telle qu’elle est réalisée en Belgique, la procédure est entièrement prise en charge par le corps médical. Et c’est bien ce que refusent très majoritairement les médecins français, notamment ceux qui travaillent en soins palliatifs. Leur éthique leur interdit d’ôter la vie à qui que ce soit.
Le texte de loi prévoit une « clause de conscience », qui permettrait à un médecin de ne pas appliquer la procédure, sous réserve de confier obligatoirement la personne demandeuse à une structure qui acceptera de procéder au geste létal. C’est ce qui se fait en matière d’IVG, et aucun gynécologue n’est obligé de pratiquer une IVG si ce geste heurte ses convictions.
Le texte prévoit également un « délit d’entrave ». Il ne s’appliquerait pas aux personnes (notamment les médecins et les soignants) qui essaieraient de convaincre un candidat à l’aide à mourir d’y renoncer. Ce délit ne concernerait que les personnes qui s’opposeraient, y compris par la force, à la réalisation de tels actes programmés, comme on le voit chez certains militants anti-avortement, notamment aux États-Unis. Ce type de militantisme « pro life » est plutôt rare dans notre pays.
Mais, lorsque ce texte aura achevé tout son parcours législatif, il sera peut-être très différent de cette première mouture. J’aurai donc l’occasion d’y revenir.
Il faut noter que la plupart des demandes d’aide à mourir auxquelles sont confrontées les structures de soins palliatifs sont en fait des demandes de ne plus souffrir. Avec une prise en charge adaptée de la souffrance globale, la plupart de ces demandes s’évanouissent. Cet argument plaide pour l’extension des soins palliatifs, qui a fait l’objet d’un second texte de loi, voté à l’unanimité des députés. Le problème reste qu’il ne suffit pas d’une loi pour avoir les crédits qui vont avec, et encore moins les personnels dédiés en période de pénurie médicale. Les opposants à l’aide à mourir craignent que cet argument de la disparition des demandes d’aide à mourir quand la souffrance est prise en charge ne tombe, et que l’on étudie les demandes sans se préoccuper de ce qu’il serait possible de faire pour que le patient préfère continuer à vivre jusqu’au bout son existence.
Pour illustrer ces différentes modalités, je vous propose une « expérience de pensée ». Imaginez une personne gravement malade, sans espoir de guérison, souffrant tellement qu’elle veut en finir avec la vie. Elle est debout sur un tabouret, avec une corde autour du cou fixée par une poutre au plafond. Si le tabouret tombe, la mort par pendaison sera instantanée.
Si la personne s’est installée toute seule, et qu’elle repousse le tabouret avec ses pieds, nul ne contestera qu’il s’agit d’un suicide par pendaison.
Mais si cette personne n’a pas eu la force de s’installer toute seule dans cette position, elle aura eu besoin de l’assistance d’une tierce personne pour le faire.
Il s’agit donc d’une aide à mourir. Et là, deux options sont possibles : soit la personne repousse elle-même le tabouret, et il s’agit d’un suicide assisté ; soit c’est la personne qui l’a installée qui repousse le tabouret, et il s’agit d’une euthanasie. Dernière possibilité : la personne qui a installé le patient désirant en finir attend que ce dernier, rendu inconscient grâce à un puissant sédatif, finisse par tomber d’elle-même du tabouret, par épuisement ; il s’agit alors d’une sédation de type Clayes-Leonetti.
J’espère que ces quelques explications vous auront permis de comprendre les modalités de l’aide active à mourir.
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