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Confinés volontaires (9)

La vie de la famille Dubreuil suit gentiment son cours. Sur le plan professionnel, tout fonctionne à merveille, même si le nombre de patients pris en charge par Jacques n’est pas aussi important qu’en temps normal. Et les préoccupations de ses patients ont changé : c’est l’angoisse provoquée par le coronavirus et le confinement qui dominent. Ce confinement devient de plus en plus pesant à l’ensemble de la famille, notamment aux enfants qui deviennent un peu agressifs entre eux et avec leurs parents. Heureusement qu’il ne reste plus qu’une semaine à passer avant le déconfinement. Et, dans la semaine à venir, il y a encore un jour férié.

Ils se répètent une nouvelle fois qu’ils ont vraiment eu le privilège d’avoir été confinés dans des conditions bien plus confortables que la plupart de leurs concitoyens. Ils mesurent aussi la chance qu’ils ont eue de pouvoir continuer à travailler pendant cette période particulière.

Mélanie est toujours sous antidépresseur, dont les effets, joints à ceux de la psychothérapie, ne sont pas encore probants, car sa peur du virus est toujours omniprésente, au point qu’elle ne sort pratiquement plus de sa chambre. Jacques et Astrid craignent que le déconfinement, avec le relâchement des mesures barrière qui ne manquera pas de l’accompagner, n’aggrave l’angoisse de leur fille.

Jacques travaille toujours au développement de son appli, pour laquelle il a trouvé un nom qui le satisfait à peu près : « monpsyetmoi.com. » Il ne lui reste plus qu’à dénicher l’oiseau rare capable de développer l’application selon ses indications. En fait c’est son fils Paul qui trouvera la perle en question, en l’occurrence le frère aîné d’un de ses copains de lycée, âgé de 20 ans. Jacques est assez bluffé qu’à tout juste 20 ans un jeune soit capable d’une telle performance. Il a l’impression qu’au même âge il ne savait pas faire grand-chose, si ce n’est bosser ses cours de médecine. Décidemment, le monde dans lequel vit Jacques va de plus en plus vite. Vers quoi, au juste ?

Jacques et Astrid se promettent, une fois le déconfinement commencé, à partir de la semaine suivante, de faire le point sur la façon dont ils ont vécu cette période tellement spéciale à tous les points de vue. Ils essaieront, le plus objectivement possible, d’analyser ce qui a changé dans leur vie pendant ces huit semaines ; qu’ont-ils réussi ou raté ? Lesquels de ces changements positifs parviendront-ils à pérenniser ? Voilà des sujets de réflexion pour les semaines à venir.

Extraits du Journal de Jacques

Lundi 4 mai

« La réouverture des écoles continue de susciter un vif débat. Trois-cent-seize maires de la région Île de France demandent, dans une tribune rendue publique, que soit reportée la date de réouverture des écoles. Ils estiment que leur responsabilité, tant sur le plan moral que juridique, est trop lourde puisque finalement l’exécutif leur laisse le choix, dont ils se passeraient bien, d’ouvrir ou pas les écoles de leurs communes. »


« Un mot sur cette tant redoutée responsabilité pénale des maires : elle sera certainement recherchée ; mais, pour qu’elle soit retenue, il faudra qu’une faute puisse leur être imputée : « responsables mais pas coupables », comme au bon vieux temps du sang contaminé. Le Premier ministre rappelle l’esprit de la « loi Fauchon » du 10 juillet 2000 sur la définition des délits non intentionnels. »

« Des masques chirurgicaux seront disponibles dès aujourd’hui dans les magasins de la grande distribution. Là encore la polémique est vive sur ce sujet sensible. Le Dr Jean-Paul Hamon, président de la Fédération des Médecins de France, s’indigne de cette vente au grand public de masques chirurgicaux alors que les professionnels de santé en manquent cruellement. (…) En définitive cette pénurie de masques aura été une véritable croix à porter pour l’exécutif, qui aura probablement du mal à faire oublier cette carence, et sa désastreuse communication sur ce sujet. »

« Le ministre de la Santé se plaint du comportement des Français qui ne respectent plus aussi bien le confinement que les semaines précédentes. Il faut dire que cela commence à être vraiment long pour tous ceux qui sont confinés dans des conditions difficiles. Des pays comme l’Allemagne ou le Royaume-Uni ont mis en place un confinement moins drastique, et donc probablement plus facile à respecter. (…) Le point définitif sera fait le 7 mai au soir, et l’on saura si la date du 11 mai est maintenue. Si elle l’est, la carte de France ne comportera plus que des départements verts ou rouges. (…) Je remarque, en regardant cette carte des départements qui n’est pas définitive, qu’elle recoupe de manière presque parfaite celle des régions. En définitive, le déconfinement sera donc dans les faits bien différencié par régions, dans l’esprit de Montesquieu, contrairement à l’option nationale choisie par le Président, dans l’esprit jacobin de Rousseau. »

« Dans l’après-midi Édouard Philippe présente aux sénateurs son plan de déconfinement, et plaide pour une prolongation de deux mois de l’état d’urgence sanitaire, nécessaire pour imposer aux personnes des limitations de circulation. Il sera de fait prolongé jusqu’à au moins le 24 juillet. »

La réalité ultérieure, c’est que l’état d’urgence sanitaire sera prolongé jusqu’au 10 juillet.

« J’apprends que le manuel mis à disposition des directeurs d’écoles pour leur expliquer comment organiser une rentrée scolaire « sanitairement correcte » comporte 54 pages ! On comprend que beaucoup de maires estiment qu’ils manquent de temps pour répondre à de telles exigences. On reconnaît bien là le caractère tatillon de l’administration française. »

« Je ne résiste pas au plaisir de citer cette jolie formule d’un ministre suisse : « Déconfiner aussi vite que possible, aussi lentement que nécessaire ». Bien vu… »

« Sur le site officiel du gouvernement, un espace est dédié à la rectification des fake news. Réaction sarcastique de plusieurs commentateurs : ce n’est pas au gouvernement de faire le travail de la presse. Ce n’est pas faux. Encore un faux pas dans la communication gouvernementale ? »

Mardi 5 mai

« Cette fois ça y est, la barre des 25 000 décès est franchie. Quel sera le bilan définitif, et quand pourrons-nous le tirer ? Nul ne peut répondre à cette question. (…) La DGS (Direction générale de la santé) communique régulièrement par mail avec les professionnels de santé. Le message du jour concerne les règles d’approvisionnement en masques. »

Fin juin, la France s’apprêtera à franchir le cap des 30 000 morts, qui sera atteint le 10 juillet, dernier jour de l’état d’urgence sanitaire.

« D’après un médecin spécialiste de Santé publique, le Dr Martin Blachier, les enfants seraient beaucoup moins vecteurs de l’épidémie qu’on ne l’a cru jusque-là, par analogie avec la grippe. Et ceux qui ont été contaminés l’auraient été par des adultes. Les enfants sont donc peut-être moins en danger à l’école qu’on ne le pense habituellement. Et puis nous allons devoir vivre encore longtemps avec ce virus, de sorte que les mesures-barrière qui vont être prises, notamment dans les écoles, sont probablement appelées à durer. En attendant leur mise en place représente un véritable casse-tête pour les enseignants. »

Le Dr Blachier sera régulièrement invité sur les plateaux de télévision, et ses interventions seront toujours jugées très claires par Jacques. Quand sera évoquée avec insistance la possibilité d’une deuxième vague, il ne cessera de dire que nous savons dorénavant quoi faire pour la contenir et ne pas avoir à reconfiner tout le pays. En gros, il suffira de copier ce qu’ont très bien fait certains pays asiatiques comme Singapour, Taïwan ou la Corée du Sud.

Mercredi 6 mai

« Une heure d’émission consacrée aux tensions de plus en plus vives entre la Chine et les pays occidentaux, les États-Unis bien sûr, mais aussi les grands pays européens et même l’Australie. Un seul exemple du langage peu diplomatique qui prévaut actuellement : le secrétaire d’État américain Mike Pompeo, qui lui-même ne fait habituellement pas dans la dentelle langagière, est traité par la Chine « d’ennemi de l’humanité ». Bigre… (…) Les Chinois supportent très mal l’idée d’être stigmatisés pour leur gestion de l’épidémie, et n’accepteront probablement jamais une commission d’enquête internationale, dans la mesure où ils ont déjà rejeté catégoriquement l’idée d’une inspection de l’OMS, institution qui leur est pourtant plus que favorable. (…) La France envisage de diminuer sa dépendance envers la Chine, notamment dans le secteur du médicament. Mais cela ne sera pas nécessairement simple à faire, tant la Chine est devenue un partenaire essentiel dans les échanges industriels et commerciaux. »

« Aux États-Unis trente millions d’Américains sont sans emploi, ce qui veut plus ou moins dire sans ressources. Beaucoup d’entre eux ont entamé une grève des loyers, qui n’est pas du tout dans la culture américaine. (…) En France les entreprises de moins de dix salariés seront exonérées de charges pour les mois de mars, avril et mai, ce qui est nettement plus conforme à notre culture. »

« Encore un petit couac dans la communication de l’exécutif : Emmanuel Macron annonce les résultats très attendus de l’essai européen Discovery (qui teste quatre traitements différents) pour le 14 mai. Cette date est immédiatement contredite par la responsable française de l’essai, le Pr Mentre. Il n’y a pas encore assez de patients inclus. Et pan sur les doigts du Président… »

Jacques se demande pourquoi Macron prend le risque de faire une annonce aussi aléatoire.

« Et pour finir sur une note optimiste et exotique : le sérum de lama contient un anticorps particulier susceptible d’empêcher le virus de se fixer aux cellules.

Le lama pourrait devenir aussi irréfutable que l’éléphant de Vialatte. »

On l’aura compris, Jacques est un grand fan de du génial Alexandre Vialatte.

« Le Royaume-Uni, en frôlant la barre des 30 000 décès, devient le deuxième pays le plus impacté au monde par l’épidémie après les États-Unis. Le gouvernement britannique pourrait poursuivre le confinement, qui reste cependant moins strict que chez nous, et fait appel au civisme anglais, sans qu’il soit besoin de brandir des sanctions, ce qui n’est pas surprenant de la part d’un pays qui n’arme pas ses policiers. (…) Boris Johnson a présenté des excuses aux Britanniques pour le nombre élevé de morts. (…) Une telle chose serait-elle possible de la part d’un dirigeant ? (…) Anecdote savoureuse dont les Anglais ont le secret : leur « M. Confinement », l’épidémiologiste Neil Ferguson, démissionne après qu’un journal a révélé qu’il recevait sa maîtresse chez lui en plein confinement, faisant en cela le contraire de ce qu’il recommande à la population. Détail croustillant, la maîtresse en question et lui-même sont mariés, chacun de leur côté. »

« Aux États-Unis, Donald Trump emploie un vocabulaire de plus en plus guerrier pour parler du virus : la pire attaque que son pays ait subie depuis Pearl Harbour et le World Trade Center. Il ne cache plus ce qu’il croit être la vérité, à savoir que cette crise sanitaire a été téléguidée par un ennemi des États-Unis, la Chine, qu’il évite cependant de nommer. Dans le même temps, l’ambassadeur de Chine en France relaie des vidéos complotistes selon lesquelles le virus aurait commencé sa folle course aux USA. Cette escalade verbale pourrait mal se terminer. »

« L’Allemagne déconfine à marche forcée, mais dans le calme et la discipline, avec la réouverture annoncée des restaurants pour ce samedi. Il semblerait donc que les craintes exprimées, notamment par le virologue Christian Drosten, sur un possible redémarrage rapide de l’économie soient levées en Allemagne. »

On verra dans la deuxième quinzaine de juin les Allemands reconfiner 600 000 personnes à cause d’un gigantesque cluster à proximité d’un abattoir, le plus grand d’Europe.

« J’ai le sentiment que, lorsque la crise sanitaire sera passée et que l’heure des bilans aura sonné, il faudra se demander pourquoi les Allemands s’en seront sortis beaucoup mieux que nous. Une différence de taille : il n’y a pas eu besoin de surjouer de la peur pour faire adhérer les Allemands aux mesures prises. Un seul exemple : nos voisins n’ont pas jugé nécessaire de mettre en place des attestations de sortie et des pénalités financières pour les éventuels récalcitrants. Alors que chez nous tout a fonctionné sur la peur : peur du virus, peur du gendarme, peur du voisin infirmier libéral possiblement contaminant, peur de l’écroulement de l’économie, peur du retour à l’école… La peur, vous dis-je ! »

« Suite à une tribune signée par plusieurs artistes de renom comme Catherine Deneuve ou Omar Sy, Emmanuel Macron présente aujourd’hui son plan d’aide à la culture, secteur totalement sinistré qui représente plus d’un million d’emplois, et 2,2% du PIB. (…) Le Président est accompagné par son ministre de la Culture, Franck Riester, dont certains se sont demandés où il était passé depuis le début de la crise, allant même jusqu’à diffuser un ironique « avis de recherche ». À la décharge de l’intéressé, il faut rappeler qu’il a été lui-même contaminé par le coronavirus, ce qui, reconnaît-il, l’a pas mal secoué, mais ne l’a pas empêché de travailler en visioconférence avec ses collaborateurs. Mais en fait son ministère a œuvré dans la discrétion, puisqu’un certain nombre de mesures annoncées par Emmanuel Macron était déjà prêtes, comme la prorogation jusqu’en août 2021 des allocations de chômage pour les intermittents qui n’auront pas suffisamment travaillé pour y avoir droit. C’est ce que le Président appelle une « année blanche ». De même les tournages de fictions pourront reprendre dès le 11 mai, à condition de respecter les mesures sanitaires (par exemple, pas plus de 50 personnes sur un plateau). Un fonds d’indemnisation sera mis en place pour pallier les assureurs qui refusent de couvrir le risque d’un tournage interrompu par le Covid-19. »

« On commence à voir apparaître en public le « M. Déconfinement » du gouvernement, l’énarque Jean Castex, avec son fort accent du Sud-Ouest. Il est né dans le très joli village gascon de Vic-Fezensac dans le Gers, et occupe le fauteuil de maire de Prades, village des Pyrénées catalanes célèbre dans le monde de la musique pour avoir été pendant des années le refuge de Pablo Casals fuyant l’Espagne de Franco. Il a été nommé le 2 avril 2020 à son poste, dont l’intitulé exact est « coordinateur du groupe de travail interministériel sur les stratégies du déconfinement ». C’est un ancien proche collaborateur de Nicolas Sarkozy, dont il a été le conseiller aux Affaires sociales en remplacement de Raymond Soubie. Et ce n’est pas un novice en matière sanitaire puisqu’il a été, de 2005 à 2006, « directeur de l’hospitalisation et de l’organisation des soins » au ministère des Solidarités et de la Cohésion sociale, puis, de 2006 à 2007, directeur de cabinet de Xavier Bertrand au ministère de la Santé. Il le suit au ministère du Travail de 2007 à 2008. Bref, c’est un homme du sérail, et c’est peu de dire que la France compte sur ce haut fonctionnaire dont tout le monde vante la compétence pour réussir le déconfinement. »

Lors du remaniement ministériel du 3 juillet, c’est ce bon élève qui remplacera Édouard Philippe à Matignon, bien que ce dernier n’ait nullement démérité, de l’avis même du Président. Et il quittera son poste avec une cote de popularité enviable.

« De nombreux commentateurs de la vie politique hexagonale croient percevoir des dissensions entre les deux têtes de l’exécutif, avec un Premier ministre « au charbon », « les mains dans le cambouis », dont la cote de popularité a augmenté de 6 points, et un Président qui semble chercher sa place, et qui a baissé de 3 points dans les sondages d’opinion. Leur rhétorique est également assez différente. Édouard Philippe tient un discours sérieux de grande prudence, avec des expressions susceptibles de faire peur, comme « écroulement économique », pendant qu’Emmanuel Macron a abandonné le ton martial de ses premiers discours pour un ton plus rassurant, presque badin, allant même jusqu’à trouver excessifs les « grands mots » de son Premier ministre. Beaucoup de ces commentateurs croient savoir que le sort du premier ministre, en poste depuis 3 ans, serait scellé. (…) Mais, alors que l’exécutif n’arrive pas à obtenir la confiance des Français, aucun leader de l’opposition ne semble tirer un profit politique de la situation, contrairement à ce qui se passe d’habitude. Il se pourrait donc que ce soit des politiciens en général que les Français se méfient. »

Jeudi 7 mai

« Ce matin j’entends beaucoup parler de culture, en réaction aux décisions annoncées par Emmanuel Macron. Sur France Info c’est le comédien Philippe Torreton qui est interrogé. Il nous dit une chose très juste : sans la culture, notre confinement aurait été intolérable. Peut-on s’imaginer enfermé chez soi deux mois durant sans lecture, sans musique, sans fiction ni documentaire ? Certes non. Il a beaucoup de mal à comprendre que les théâtres doivent rester fermés tandis que les centres commerciaux sont autorisés à recevoir un public forcément moins discipliné que celui d’une salle de spectacle.

Sur France Musique c’est le musicien Sébastien Daucé, fondateur de l’ensemble Correspondances, qui est interrogé. Il fait partie des douze artistes invités à donner leur point de vue en visioconférence avec Emmanuel Macron et Franck Riester. Il semble convaincu par la qualité de leur écoute en ce qui concerne leurs revendications, notamment pour les intermittents.

Dans l’ensemble les propositions de l’exécutif semblent plutôt bien perçues. Mais des voix discordantes ne manqueront pas de se faire entendre, ce qui est bien normal. »

Jacques et Astrid sont eux aussi convaincus que, sans la culture, leur confinement, ainsi que celui de la plupart des Français, aurait été tout simplement intolérable.

« Dans le milieu de l’après-midi le Premier ministre entouré de six de ses principaux ministres annonce en direct que le déconfinement commencera bien le lundi 11 mai. (…) La carte du troisième critère, la disponibilité des tests, est intégralement verte, ce qui fait disparaître de facto la couleur orange. Désormais, et pour les trois semaines à venir, la France est coupée en deux : un gros quart nord-est est en rouge, et le reste en vert. Sans surprise, cette carte reproduit celle des régions, avec quatre d’entre elles où le déconfinement sera plus progressif, sans réouverture immédiate des collèges ni des parcs et des jardins. Ces quatre régions sont l’Île de France, les Hauts de France, le Grand-Est et la Bourgogne Franche-Comté. Parmi les départements ultramarins, seul Mayotte est en rouge, et sera déconfiné plus tard. »

La Guyane rejoindra bientôt Mayotte dans la catégorie des départements ultramarins fortement impactés.

« Parmi les mesures attendues, il y en a une qui brille par son absence, c’est le port du masque obligatoire dans l’espace public, qui était souhaité par beaucoup de médecins en charge de l’épidémie. Il ne le sera que dans certains endroits, comme par exemple dans tous les transports en commun. (…) L’attestation dérogatoire de déplacement ne sera plus nécessaire que dans les transports en commun aux heures de pointe (attestation de l’employeur), et pour les déplacements indispensables à plus de 100 km de chez soi (à vol d’oiseau).

Les bars, restaurants, cinéma et théâtres resteront encore fermés. Pour les plages, leur réouverture au public, qui était très attendue par les régions côtières, sera possible sur demande des maires et par autorisation préfectorale, sauf dans les départements en rouge. (…) Le télétravail devra être privilégié chaque fois qu’il sera possible. Et ça tombe bien car 73% de ceux qui ont dû s’y mettre souhaitent le continuer. »

« Sur le plan économique, 450 000 emplois ont été perdus en un trimestre, ce qui est un chiffre colossal, mais hélas appelé à augmenter encore car la reprise économique va prendre du temps. Tout le monde, économistes en tête, attend donc avec impatience le plan de relance économique du gouvernement. »

« Une petite question de sémantique pour terminer : faut-il dire « rouvrir » ou « réouvrir » ? Il semble que la première option soit la plus correcte (seul le Larousse connaît réouvrir). Mais on dit « réouverture ». Mystères du français... »

Vendredi 8 mai

« Confinement oblige, les cérémonies du 8 mai qui célèbrent la fin de la Deuxième Guerre mondiale sont réduites à leur plus simple expression. C’est l’occasion pour Emmanuel Macron d’être aux côtés de ses deux prédécesseurs. Et manifestement le courant passe mieux avec Nicolas Sarkozy qu’avec François Hollande. Mais il est vrai qu’il n’a pas le même contentieux avec le premier qu’avec le second. »

« Un cluster a été dépisté en Dordogne, département plutôt épargné jusque-là par l’épidémie, qui s’est formé à l’occasion d’un enterrement auquel auraient assisté beaucoup plus de gens que les vingt personnes autorisées. »

« Un ami, abonné du journal Le Monde, m’a fait parvenir le papier de Lhomme et Davet sur la genèse de la pénurie de masques. C’est trop long pour que j’en fasse ici le résumé, mais il apparaîtra, d’après nos deux journalistes, quand sera venu le temps de la commission d’enquête parlementaire, que le Directeur de la Santé, le Pr Salomon, qui fait un point-presse quotidien apprécié des journalistes, aura joué un rôle sur lequel il devra s’expliquer, ainsi qu’Agnès Buzyn. »

Quand cette dernière sera entendue, le 30 juin, elle expliquera que la gestion du stock de masques ne faisait pas partie de ses attributions ministérielles. Ce n’est pas bien de se défausser ainsi de ses responsabilités ! Au minimum elle aurait dû être au courant de ce problème.

Samedi 9 mai

« La Reine d’Angleterre s’est exprimée hier soir à la télévision, à l’heure exacte où son père prenait la parole sur les ondes pour annoncer à son peuple la fin de la guerre. C’était il y a 75 ans, et j’imagine que le Roi George VI était plus à l’aise devant le micro que lors du célèbre discours radiodiffusé annonçant l’entrée en guerre de son pays. La genèse de ce discours a été racontée dans un film absolument bouleversant, Le Discours d’un roi (The King’s Speech). »

« Son Premier ministre Boris Johnson, qui relève du Covid-19 et d’une nouvelle paternité, la seconde probablement moins douloureuse que le premier, a appris l’humilité et la prudence. Et, comme il est perçu comme très sympathique et empathique, il reste très populaire dans son pays, le plus touché au monde par la pandémie après les États-Unis. En Europe, si l’on rapporte le nombre de décès au nombre d’habitants (c’est la définition exacte de la mortalité), c’est la Belgique le pays le plus impacté, la France arrivant en quatrième position. »

« Les États-Unis, qui comptent plus de 75 000 morts, commencent à déconfiner, notamment la Californie démocrate, l’état le plus peuplé du pays. Curieusement Trump ne semble pas avoir dit ces derniers jours d’énormité qui aurait fait les choux gras des médias du monde entier. Mais, faisons lui confiance, il va sûrement se ressaisir prochainement. »

« On ne parle jamais, depuis le début de la pandémie, du grand pays qu’est la Russie. Vladimir Poutine avait prévu de fêter en grande pompe et avec force démonstration de sa puissance militaire, ce 9 mai (et non pas le 8 comme pour les autres belligérants), les 75 ans de la victoire de l’URSS sur l’Allemagne nazie. Il est obligé de renoncer à cette célébration à laquelle de nombreux dirigeants, dont Emmanuel Macron, étaient conviés. »

« Tout autre chose : les auxiliaires de vie, dont le rôle a été essentiel dans les EHPAD auprès des personnes âgées privées de la visite de leurs proches, demandent une revalorisation de leur statut, et à être considérés comme des soignants à part entière. Ce ne serait que justice, me semble-t-il. »

« Astrid est allée en ville faire quelques courses alimentaires, en emportant la dernière « attestation dérogatoire de déplacement » dont elle aura besoin. Elle revient avec la nette impression que les habitants de notre cité sont déjà déconfinés dans leur tête. Elle n’a jamais vu autant de monde dans les rues depuis le début du confinement, la plupart sans masque. Et du coup elle s’inquiète pour la suite. »

Dimanche 10 mai

« L’émission C L’hebdo, diffusée sur la 5ème chaîne de télévision le samedi à 18 heures et animée par l’excellent Ali Baddou, a la bonne idée de dérouler sous nos yeux incrédules l’historique de la pandémie, chez nous et dans le monde, depuis janvier. Il est en effet à peine croyable de constater à quel point personne n’avait vu arriver le danger. Quand l’Italie s’est confinée, ce fut stupeur et tremblement. Personne n’avait imaginé qu’un grand pays européen démocratique puisse prendre pareille mesure sanitaire. L’Europe n’est pas la Chine, tout de même, en termes de respect des libertés individuelles. Huit jours plus tard, c’était à notre tour d’entrer en confinement et en récession économique volontaire. Le plus éclairant de ce récapitulatif est la succession des prises de paroles quotidiennes de Donald Trump. Même en mettant de côté ses mensonges grossiers, ses extravagances et ses incohérences, pour rester poli, on voit bien qu’il a dû passer, en quelques semaines, de la certitude que son pays serait épargné à l’idée que l’épidémie était la pire « attaque » que celui-ci n’ait jamais connue. »

Jacques se dit qu’un des intérêts du Journal qu’il a tenu quotidiennement pendant le confinement est précisément de pouvoir se remémorer ultérieurement la chronologie de toute cette aventure, qui paraîtra probablement incroyable même aux gens qui l’ont vécue quand ils y repenseront dans quelques années.

Jacques entend pour la première fois prononcer le nom de Didier Pittet, qui a popularisé l’usage du gel hydro-alcoolique. Il apprend que ce médecin infectiologue et épidémiologiste, né à Genève en mars 1957, est suisse. « Contrairement à ce que dit Ali Baddou il n’est pas réellement l’inventeur du gel hydro-alcoolique. Cet honneur revient à une infirmière américaine, Guadalupe Hernandez, en 1966. Le rôle de Didier Pittet, véritablement essentiel, a été d’organiser le don du brevet à l’OMS pour que la solution hydro-alcoolique puisse être fabriquée partout dans le monde à moindre coût. Son employeur estime, avec un humour dont les Suisses ne sont pas nécessairement coutumiers, qu’il est « le médecin le plus cher du monde, par manque à gagner ». Je ne suis pas surpris que ce chantre de l’hygiène des mains soit un citoyen de la Suisse, ce pays où tout est tellement propre en apparence. Si l’on voulait être méchant, et probablement très injuste, on dirait que la seule saleté que la Suisse tolère, c’est celle de l’argent que les riches du monde entier planquent dans les coffres de ses banques. »

Extraits des Carnets de la drôle de guerre

N°43

Ce numéro se penche sur la question de la légitimité de la désobéissance civile en période d’urgence sanitaire. Catherine Portevin a posé la question à deux philosophes, Frédéric Gros et Pierre-Henri Tavoillot. Le premier est professeur de pensée politique à Sciences-Po, le second est maître de conférences en philosophie à la Sorbonne, président du Collège de philosophie.

Une petite précision sémantique liminaire me semble nécessaire avant de prendre connaissance des arguments des deux débatteurs. L’expression anglaise civil disobedience introduite au XIXème siècle par le philosophe américain Henry David Thoreau est habituellement traduite par désobéissance « civile », dans le sens popularisé par Gandhi de « non-violente », mais de plus en plus souvent par désobéissance « civique ». Les deux adjectifs sont donc admis, bien qu’ils n’aient pas tout à fait la même signification.

Frédéric Gros répond par l’affirmative à la question posée, Pierre-Henri Tavoillot par la négative.

N°44

Cette livraison donne la parole à un philosophe allemand d’origine coréenne, Byung-Chul Han, penseur présenté comme iconoclaste. Sa biographie est assez fascinante : à 22 ans, il quitte la Corée du Sud pour l’Allemagne, dans le but d’y poursuivre des études de métallurgie, qui se transforment secondairement en études de philosophie et de théologie. Il est à ce jour le seul étudiant non allemand à avoir soutenu avec succès une thèse d’État de philosophie en Allemagne et en allemand. Il est actuellement professeur à l’Université des Arts de Berlin. Il a publié plusieurs essais traduits dans le monde entier, y compris en Corée du Sud et en Chine, où ils rencontrent un franc succès. L’auteur (anonyme) de la présentation de ce philosophe nous dit que « sa pensée, qui s’inspire de Martin Heidegger, prend parfois la forme d’une imprécation contre la modernité. Mais elle touche à des points sensibles de notre expérience, comme lorsque Byung-Chul Han dénonce le nouvel idéal néolibéral de la performance qui fait que chacun est mis en demeure de s’auto-exploiter lui-même, au risque de la dépression et du burn-out. »

Les conclusions de ce philosophe peuvent choquer, notamment l’idée que le télétravail pourrait devenir l’équivalent libéral du «  camp de travail » des sociétés totalitaires, Chine en tête de liste. Mais « les questions qu’il pose sur l’avenir de la démocratie et des libertés à l’heure où la Chine prétend disposer, avec son modèle de surveillance généralisée, d’une solution à tous nos problèmes, méritent d’être entendues et débattues. »

N°45

Les Carnets de la drôle de guerre donnent la parole à la rédactrice en chef de l’édition allemande de Philosophie Magazine, Svenja Flaßpöhler. Elle nous parle du confinement qu’elle a connu à Berlin, et du déconfinement qui commence dans son pays. Elle espère ardemment que le déconfinement ne se limitera pas au retour au statu quo ante de notre mode de vie, mais qu’il sera l’occasion de prendre un nouveau départ : « Nous devons saisir le kairos (le « moment opportun », en grec) lorsqu’il se présente : nous nous trouvons dans une situation historique unique. L’économie mondiale a été mise à l’arrêt en un temps très court. Si ce n’est pas dans ce moment de pause, quand pourrons-nous changer de regard sur ce que nous tenons pour « normal » ? Quand se représentera une occasion d’ouvrir les fenêtres en grand, de regarder au loin et de nous demander comment nous voulons vivre ? Quand aurons-nous une telle possibilité de lancer le débat sur les éléments de notre système dont nous avons besoin, ceux dont nous ne voulons pas et ceux qui doivent être modifiés – afin d’envisager humainement l’avenir ? »

Et, après avoir cité le philosophe Herbert Marcuse, elle se pose et nous pose la question suivante : « Serions-nous prêts à sacrifier un peu de notre confort matériel pour plus de liberté personnelle (sans même parler des bénéfices pour la nature) ? C’est l’une des questions qui, je l’espère, seront débattues dans l’espace public et sur la scène politique. Ainsi seulement nous serons en capacité de nous regarder différemment au prisme de la crise. »

Jacques se pose la question : ce débat aura-t-il lieu en Allemagne ? Et en France ? Il est permis de l’espérer tout en craignant qu’il n’en soit rien.

N°45

Ce même numéro est consacré à Épicure, dont la romancière et philosophe italienne Ilaria Gaspari relit pour nous la Lettre à Ménécée.

Après elle je me permets de citer quelques extraits de cette célébrissime Lettre.

« Ainsi celui de tous les maux qui nous donne le plus d’horreur, la mort, n’est rien pour nous, puisque, tant que nous existons nous-mêmes, la mort n’est pas, et que, quand la mort existe, nous ne sommes plus. Donc la mort n’existe ni pour les vivants ni pour les morts, puisqu’elle n’a rien à faire avec les premiers, et que les seconds ne sont plus. (…) Mais la multitude tantôt fuit la mort comme le pire des maux, tantôt l’appelle comme le terme des maux de la vie. Le sage, au contraire, ne fait pas fi de la vie et il n’a pas peur non plus de ne plus vivre : car la vie ne lui est pas à charge, et il n’estime pas non plus qu’il y ait le moindre mal à ne plus vivre. (…) Quant à ceux qui conseillent aux jeunes gens de bien vivre et aux vieillards de bien finir, leur conseil est dépourvu de sens, non seulement parce que la vie a du bon même pour le vieillard, mais parce que le soin de bien vivre et celui de bien mourir ne font qu’un. »

Jacques pense qu’il serait bon d’afficher la dernière phrase de ce texte dans tous les EHPAD et autres structures hébergeant des personnes âgées.

Ilaria Gaspari termine son commentaire de cette façon plutôt convaincante en cette période où la peur de mourir du Covid-19 est devenue envahissante : « La philosophie épicurienne est un outil logique pour ne pas être esclave de notre peur de la mort. Elle nous libère et nous permet d’agir. »

Comme l’explique Irvin Yalom dans Le Jardin d’ Épicure, il se sert beaucoup de cette philosophie chez ses patients atteints par « l’angoisse de mort ». Jacques en fait de même, en bon disciple qu’il est.

N°46

Cette livraison évoque, par le truchement de Martin Legros, le sujet de la responsabilité.

Le projet de loi prolongeant l’état d’urgence sanitaire, voté par le Sénat le mardi 6 mai 2020, stipule que «  Nul ne peut voir sa responsabilité pénale engagée du fait d’avoir, pendant la durée de l’état d’urgence sanitaire, soit exposé autrui à un risque de contamination, soit causé ou contribué à causer une telle contamination. » Circulez, il n’y a rien à voir, alors qu’une dizaine de plaintes a déjà été déposée contre le Premier ministre et le ministre de la Santé. Cependant que l’on attendait que toute la lumière soit faite sur la pertinence des décisions prises par l’exécutif, c’est l’amnistie qui est envisagée. Tout comme le Président de la République, pénalement irresponsable pendant la durée de son mandat, tous les autres décideurs ne seront pas justiciables de leurs actes, qu’ils soient élus locaux, fonctionnaires ou chefs d’entreprise, à égalité sur ce plan devant la loi. La seule responsable politique à s’offusquer de cette « autoamnistie préventive » est Marine Le Pen, qui aurait probablement agi de la même façon si elle avait été aux responsabilités.

Mais en réalité, nous dit Martin Legros, les choses ne sont pas aussi simples que cela. En effet le projet de loi, qui doit encore être débattu à l’Assemblée, précise que les poursuites pénales seront suspendues « à moins que les faits n’aient été commis intentionnellement, par imprudence ou négligence ou en violation manifestement délibérée (…) d’une obligation particulière de prudence ou de sécurité prévue par la loi ou le règlement. »

Les sénateurs ont voulu répondre à la demande des maires, qui seront en première ligne dans la gestion du déconfinement (notamment pour la décision de rouvrir les écoles). Si des enfants devaient être contaminés à l’école, la crainte exprimée par les maires est d’être poursuivis pour « mise en danger de la vie d’autrui ». La loi Fauchon limite déjà la responsabilité pénale pour des délits « non intentionnels », mais elle laisse au juge le soin d’apprécier qu’aucune « faute caractérisée » n’a été commise. La nouvelle loi, si elle est validée par les députés, mettrait les maires à l’abri de telles poursuites.

On voit bien qu’à tous les échelons de la classe politique, la crainte de devoir rendre des comptes augmente, non seulement politiquement (c’est inhérent à la fonction) mais surtout juridiquement.

En France, la dernière fois que le problème s’est posé, ce fut lors de l’affaire dite « du sang contaminé », en 1999. Laurent Fabius, Premier ministre, et Georgina Dufoix, sa ministre des Affaires sociales, qui avait déclaré se sentir « responsable mais pas coupable », formule mal comprise amenée à une postérité notoire, avaient été poursuivis devant la Cour de justice de la République. Ce que ne dit pas Martin Legros, c’est que ces deux personnalités de premier plan ont finalement bénéficié d’un non-lieu, alors qu’Edmond Hervé, secrétaire d’état à la Santé, a payé les pots cassés au prix fort. Dur, dur d’être le lampiste de service…

Lors du procès, le philosophe Paul Ricœur avait déclaré ceci : « Je rêve d’une instance d’investigation, de débats contradictoires, quelque chose comme une cour civique, qui soit le règne de la publicité contre l’opacité, de la célérité contre l’atermoiement, de la prospective contre un passé qui ne veut pas passer. » Cette idée d’une « cour civique » semble particulièrement d’actualité à Martin Legros.

N°47

Les Carnets de la drôle de guerre évoquent une possible revanche de la campagne sur la ville. Si la fuite d’un bon million de Parisiens vers leurs résidences secondaires la veille du confinement pour se mettre au télétravail dans des conditions de calme et de confort n’indique rien de particulier pour l’après confinement, en revanche les agences immobilières sont saisies d’un grand nombre de demandes pour l’achat de résidences principales en province. La tentation semble donc forte pour les urbains de fuir les villes pour trouver un cadre de vie plus agréable, avec plus d’espace vital et surtout un jardin.

Est-ce que la répartition entre ville et campagne va s’en trouver durablement modifiée ? C’est la question qui est posée au sociologue Éric Charmes et au géographe Michel Lussault. Le premier pense que la campagne va devenir de plus en plus attractive. Le second plaide pour que les villes se « réinventent » pour garder leurs habitants. Cela dit, ce mouvement d’exode rural inversé n’a pas attendu la crise sanitaire actuelle pour commencer.

N°48

Ce numéro des Carnets est consacré aux cafés, aux bars et aux bistrots, considérés comme des lieux « non indispensables à la vie du pays ». Il donne la parole à l’anthropologue Marc Augé, à la sociologue Anne Steiner, à l’écrivain suisse germanophone Arno Camenish, au patron de bistrots Xavier Denamur et à la DJ Barbara Buch, qui organise des fêtes virtuelles. Ils mettent tous en avant le fait que ces établissements sont essentiels pour créer du lien social. Il n’est donc pas vraiment surprenant qu’ils aient été les premiers à être fermés, pour cause de distanciation sociale.

N’oublions pas que certains villages qui étaient en train de mourir d’isolement, après la fermeture de leur dernier commerce, ont été providentiellement réanimés grâce à l’ouverture d’un café, offrant de surcroît quelques services essentiels, servant tout à tour de bureau de poste, de dépôt de pain ou d’épicerie. Ces lieux jugés « non indispensables à la vie du pays » sont peut-être plus nécessaires que ne le pensent les technocrates.

Comme la plupart des Français, Jacques attend avec impatience de pouvoir prendre un verre à la terrasse d’un café, et même de s’offrir un bon petit restaurant avec Astrid. Patience, cela devrait revenir bientôt.

Je voudrais citer ici la première page du livre de Jérôme Fourquet et Marie Gariazzo, En immersion – Enquête sur un société confinée, bien qu’il soit sorti en juin, pendant le déconfinement, parce qu’il résume très bien ce que les Dubreuil ont vécu pendant ces huit semaines de confinement, comme tous les Français. Jacques le lira dès sa parution.

« L’épidémie de Covid-19 et le confinement généralisé qu’elle a provoqué ont constitué une épreuve inédite et singulière pour notre pays. Pendant de longues semaines, des dizaines de millions de Français sont restés chez eux ou sont allés travailler la peur au ventre car dehors un véritable tueur en série rôdait. Fait social total, la propagation du virus a, en quelques jours seulement, mis à l’arrêt l’économie, bouleversé l’agenda du gouvernement et la vie quotidienne de nos concitoyens. Emmanuel Macron a comparé à plusieurs reprises cette épidémie à une situation de guerre. Et de fait, comme lors d’un conflit, l’attention de la population et celle des dirigeants se sont focalisées sur un objectif unique : vaincre l’ennemi. Comme en période de guerre, tous les sujets de controverse qui agitaient le pays quelques semaines plus tôt sont devenus soudainement secondaires et toute l’action publique s’est trouvée subordonnée à l’effort de guerre. Des pans entiers de l’économie ont été également mobilisés dans ce but. Et comme à l’occasion d’une guerre, on a publié chaque jour un bulletin officiel témoignant de la situation au front en inventoriant le nombre de morts et de blessés. »

Fin de la première partie, le confinement



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